Q
u'est ce que la transformation finale? Les résultats précédents ont montrés que la pyramide de Khéops aurait d'abord été construite comme une pyramide à degrés dont nous avons pu retrouver les massifs de trois manières différentes. Comme les autres pyramides, elle aurait pu être construite en tranches avec un noyau central avant d'être transformée en pyramide à faces lisses. Cette transformation dite finale comprend logiquement 2 étapes : la pose des blocs des différents gradins (>203) puis celle des blocs de parement.
figure1: Structure à degrés en tranches |
Quelle est l'importance des massifs? Pour construire les massifs, les pierres utilisées auraient été levées via des puits internes aux massifs ou bien le long de murs légèrement inclinés pouvant atteindre environ 18,3 mètres de hauteur. Le volume de pierres ainsi apporté représentant plus de 80% du volume de la pyramide total [1].
Qu'en est-il des 20% de pierres restantes? La géométrie particulière de la pyramide de Khéops observée lors des mesures laser (les 8 faces) suggère qu'il aurait pu y avoir 8 chantiers en parallèle pour chacun des 7 niveaux, ce qui fait 56 chantiers possibles. Les mesures de F. Pétrie montrant une répartition des blocs des gradins bien particulière, une diminution de la taille des blocs avec la hauteur et une décroissance linéaire de la taille des plus gros blocs, d'un massif à un autre, la gestion de l'acheminement des blocs devient très compliquée, ce qui n'exclut pas les 56 chantiers en parallèle mais suggère que les gradins auraient été construits des massifs supérieurs vers les massifs inférieurs pour des raisons évidentes d'accessibilité. Le pyramidion ayant pu toutefois être posé à la fin de manière symbolique (l'a t'il été un jour?).
Et les pierres de parement? Pour rendre la pyramide lisse, on aurait pu avoir le même cheminement des pierres de parement [2]. La disposition de ces pierres montrant en effet qu'elles s'appuient sur les pierres de niveau inférieur, mais sont aussi maintenues par les pierres supérieures. C'est sans doute pour cela que le parement du sommet de la pyramide de Kephren est encore visible de nos jours tandis que le parement inférieur a disparu. Alors, les égyptiens ont-ils commencé la pose du parement en partant du haut ou bien du bas? Si on considère qu'il est périlleux d'oeuvrer sur un revêtement cimenté ou de calcaire fragile cela nous amène à penser que les égyptiens travaillaient en partant du haut, d'un autre côté comme il y a peut d'espace pour faire tenir les pierres, les égyptiens auraient dû commencer par le bas. De ces deux contradictions, il ressort que comme les gradins, les pierres de parement étaient posées des massifs supérieurs vers les massifs inférieurs, mais en posant les pierres en partant de la base de chaque massif. Ce qui reste conforme avec les propos d'Hérodote: "On commença donc par revêtir et perfectionner le liant de la pyramide ; de là on descendit aux parties voisines, et enfin on passa aux inférieures, et à celles qui touchent la terre.".
Quel a été le cheminement des pierres d'un massif à un autre? Difficile de travailler beaucoup en parallèle pour lever des pierres sur 18m de hauteur environ. Pour ne pas perturber les chantiers inférieurs et supérieurs en cours, le plus simple serait d'envisager un chemin commun aux niveaux. Il semblerait logique de penser à partir des mesures laser, que c'est au milieu des faces et peut être vers les coins des massifs que seraient passées les dernières pierres recouvrant la pyramide à degrés. En effet, si ces endroits ont été les derniers avoir été remplis, ils sont devenus difficiles d'accès pour les dernières pierres et cela pourrait expliquer les tranchées centrales observées (en rouge) et le creusement des faces (en jaune et vert). Les coins des massifs auraient pu être les derniers à avoir été remplis, le contrôle de la pente pouvant être solutionné par le positionnement des massifs de la pyramide à degrés.
Quels sont les systèmes envisageables pour monter les pierres d'un massif à un autre? Les systèmes mécaniques utilisés sont trop spécifiques pour être étudiés ici et ont déjà été évoqués dans le paragraphe "Les machines de levage". On peut quand même citer F. Löhner et son système de rouleau de corde.
De plus, si on regarde l'évolution des moyens de levage depuis l'antiquité, il est peu probable d'envisager un système mécanique permettant de réduire de beaucoup le nombre d'hommes pour lever les blocs d'un massif à l'autre. De manière générale, il n'y a que deux manières de procéder: soit en acheminant les blocs à partir de l'intérieur de la pyramide soit en les acheminant à partir de l'extérieur. La figure suivante propose un levage des blocs par un puits central pour ériger les massifs et effectuer la transformation finale. C'est le système le plus simple à envisager mais difficilement réalisable, dangereux et peu cohérent avec la disposition des pièces internes à la pyramide de Khéops.
On pourrait aussi envisager d'avoir plusieurs puits à la place du puits central. Ceci dit, la figure suivante montre un puits que l'on peut qualifier de semi-ouvert.
En ce qui concerne la seconde manière de procéder, on ne peut retenir la théorie des rampes en pente faible comme beaucoup l'imaginent car il a été vu que pour accéder à des hauteurs importantes, il est plus efficace de lever une charge que de la tirer. En revanche, utiliser des rampes en pente forte (26°) faisant partie de la pyramide ou bien adossées aux massifs peut être envisageable comme imaginé par Uvo Hölscher, ou bien Franck Müller-Römer ("Wie entstanden die Pyramiden? Neueste Forschungen zur Erbauung der Pyramiden des Alten Reiches" - 2013). Là où F. Müller-Römer pourrait se tromper c'est qu'il considère, pour lisser la pyramide, que son système est éphémère et ne fait pas partie de la pyramide. Cela dit en observant toutes les pyramides connues dont celle de Mykerinos qui comporte une brèche importante, il n'existe nulle part de trace de rampe latérale.
Comment ont été constitués les gradins? Le moyen le plus simple et le plus efficace c'est le travail en parallèle. Pour lever un bloc d'un gradin à un autre, il suffirait d'utiliser des équipes d'une dizaine d'hommes équipés de leviers et de cales (M. Isler et P. Hodges).
Et le revêtement? Même organisation, travail différent
Qu'en est-il des 20% de pierres restantes? La géométrie particulière de la pyramide de Khéops observée lors des mesures laser (les 8 faces) suggère qu'il aurait pu y avoir 8 chantiers en parallèle pour chacun des 7 niveaux, ce qui fait 56 chantiers possibles. Les mesures de F. Pétrie montrant une répartition des blocs des gradins bien particulière, une diminution de la taille des blocs avec la hauteur et une décroissance linéaire de la taille des plus gros blocs, d'un massif à un autre, la gestion de l'acheminement des blocs devient très compliquée, ce qui n'exclut pas les 56 chantiers en parallèle mais suggère que les gradins auraient été construits des massifs supérieurs vers les massifs inférieurs pour des raisons évidentes d'accessibilité. Le pyramidion ayant pu toutefois être posé à la fin de manière symbolique (l'a t'il été un jour?).
Et les pierres de parement? Pour rendre la pyramide lisse, on aurait pu avoir le même cheminement des pierres de parement [2]. La disposition de ces pierres montrant en effet qu'elles s'appuient sur les pierres de niveau inférieur, mais sont aussi maintenues par les pierres supérieures. C'est sans doute pour cela que le parement du sommet de la pyramide de Kephren est encore visible de nos jours tandis que le parement inférieur a disparu. Alors, les égyptiens ont-ils commencé la pose du parement en partant du haut ou bien du bas? Si on considère qu'il est périlleux d'oeuvrer sur un revêtement cimenté ou de calcaire fragile cela nous amène à penser que les égyptiens travaillaient en partant du haut, d'un autre côté comme il y a peut d'espace pour faire tenir les pierres, les égyptiens auraient dû commencer par le bas. De ces deux contradictions, il ressort que comme les gradins, les pierres de parement étaient posées des massifs supérieurs vers les massifs inférieurs, mais en posant les pierres en partant de la base de chaque massif. Ce qui reste conforme avec les propos d'Hérodote: "On commença donc par revêtir et perfectionner le liant de la pyramide ; de là on descendit aux parties voisines, et enfin on passa aux inférieures, et à celles qui touchent la terre.".
Quel a été le cheminement des pierres d'un massif à un autre? Difficile de travailler beaucoup en parallèle pour lever des pierres sur 18m de hauteur environ. Pour ne pas perturber les chantiers inférieurs et supérieurs en cours, le plus simple serait d'envisager un chemin commun aux niveaux. Il semblerait logique de penser à partir des mesures laser, que c'est au milieu des faces et peut être vers les coins des massifs que seraient passées les dernières pierres recouvrant la pyramide à degrés. En effet, si ces endroits ont été les derniers avoir été remplis, ils sont devenus difficiles d'accès pour les dernières pierres et cela pourrait expliquer les tranchées centrales observées (en rouge) et le creusement des faces (en jaune et vert). Les coins des massifs auraient pu être les derniers à avoir été remplis, le contrôle de la pente pouvant être solutionné par le positionnement des massifs de la pyramide à degrés.
Résultat laser de W. Neubauer et al (du moins dense au plus dense, le code des couleurs est le suivant: rouge, jaune, vert, cyan) |
Quels sont les systèmes envisageables pour monter les pierres d'un massif à un autre? Les systèmes mécaniques utilisés sont trop spécifiques pour être étudiés ici et ont déjà été évoqués dans le paragraphe "Les machines de levage". On peut quand même citer F. Löhner et son système de rouleau de corde.
Levage le long d'une rampe en brique crue selon F. Löhner |
De plus, si on regarde l'évolution des moyens de levage depuis l'antiquité, il est peu probable d'envisager un système mécanique permettant de réduire de beaucoup le nombre d'hommes pour lever les blocs d'un massif à l'autre. De manière générale, il n'y a que deux manières de procéder: soit en acheminant les blocs à partir de l'intérieur de la pyramide soit en les acheminant à partir de l'extérieur. La figure suivante propose un levage des blocs par un puits central pour ériger les massifs et effectuer la transformation finale. C'est le système le plus simple à envisager mais difficilement réalisable, dangereux et peu cohérent avec la disposition des pièces internes à la pyramide de Khéops.
Transformation en partant de l'intérieur de la pyramide
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On pourrait aussi envisager d'avoir plusieurs puits à la place du puits central. Ceci dit, la figure suivante montre un puits que l'on peut qualifier de semi-ouvert.
Puits semi-ouvert (source inconnue) |
En ce qui concerne la seconde manière de procéder, on ne peut retenir la théorie des rampes en pente faible comme beaucoup l'imaginent car il a été vu que pour accéder à des hauteurs importantes, il est plus efficace de lever une charge que de la tirer. En revanche, utiliser des rampes en pente forte (26°) faisant partie de la pyramide ou bien adossées aux massifs peut être envisageable comme imaginé par Uvo Hölscher, ou bien Franck Müller-Römer ("Wie entstanden die Pyramiden? Neueste Forschungen zur Erbauung der Pyramiden des Alten Reiches" - 2013). Là où F. Müller-Römer pourrait se tromper c'est qu'il considère, pour lisser la pyramide, que son système est éphémère et ne fait pas partie de la pyramide. Cela dit en observant toutes les pyramides connues dont celle de Mykerinos qui comporte une brèche importante, il n'existe nulle part de trace de rampe latérale.
Système de Franck Müller-Römer |
Système UVO Hölscher avec rampes non démontables de 7,2m de large |
Comment ont été constitués les gradins? Le moyen le plus simple et le plus efficace c'est le travail en parallèle. Pour lever un bloc d'un gradin à un autre, il suffirait d'utiliser des équipes d'une dizaine d'hommes équipés de leviers et de cales (M. Isler et P. Hodges).
Et le revêtement? Même organisation, travail différent
Massifs avec revêtement fictif côté NE seulement |
[1] En effet, le volume de la pyramide de Khéops est donné par la formule V=Base*Hauteur/3=(230*230*146)/3=2 574 467 m3. En reprenant les hauteurs trouvées dans le paragraphe "Exploitation des mesures de F. Pétrie" c'est à dire des massifs superposés aux hauteurs 18, 30, 38, 54, 70, 90, 106, 126 dans le cas des maximums principaux avec points singuliers, on a les calculs suivant (valeurs mesurées sur une représentation 3D de ces niveaux):
Vmaxsing = 200*200*18 + 184*184*12 + 170*170*8 + 145*145*16 + 120*120*16 + 88*88*20 + 63*63*16 + 32*32*20 =720 000 + 406 272 + 231 200 + 336 400 + 230 400 + 154 880 + 63 504 + 20 480 = 2 163 136 = 84%
[2] En calcaire de Tourah selon JP Houdin ou cimenté selon M.W. Barsoum qui, inspiré par J. Davidovits, envisage une pyramide hybride utilisant à la fois des pierres moulées en surface et sculptées à l'intérieur (avec un sommet "moulé")